Catégories
Décembre 2021

Qu’est ce que le Purplewashing ?

Depuis maintenant quelques années, les grandes entreprises ont compris la force marketing du féminisme. De plus en plus de femmes sont prêtes à sortir leur portefeuille pour des produits qu’elles considèrent plus éthiques et plus proches de leurs valeurs. 

L’exemple Frida Kahlo

On se rappelle tous cette période où l’icône féministe était représentée sur tout et n’importe quoi… T-shirts, mugs, cosmétiques, meubles et j’en passe. 

Une tendance qui a eu son succès car Frida Kahlo, pour beaucoup d’entre nous, est LA représentation de l’émancipation des critères de beauté patriarcaux et occidentalo-centrée. 

Pourtant, si on s’y penche de plus près, on remarque qu’à travers la surexploitation de l’image de l’artiste, pas mal de transformations ont été opérées. Des transformations physiques qui la font se conformer à l’image même à laquelle elle s’opposait. Et cela même sans parler de la totale contradiction entre cette surexploitation mercantile et l’idéologie même de Frida Kahlo, qui entre autres, était farouchement opposée au capitalisme.

Pour vendre leurs produits à l’imagerie féministe (mais pas trop quand même, n’abusons rien), les marketeux de tous poils sont passés effacer les traits “trop peu féminins” de Frida. Sa peau a été blanchie, son handicap a disparu comme par magie, son mono-sourcil s’est fait fin et dessiné et sa moustache a été rasée. Dans les articles où elle apparait des pieds à la tête, son corps ne ressemble plus du tout à celui de la femme qui a vécu toute sa vie dans un fauteuil roulant.

Frida Kahlo comme elle se représentait : portrait au collier d’épines et colibri, Frida Kahlo (1940)

Frida représentés dans quelques produits discutables

Une évolution nécessaire des produits à destination des femmes ? 

Le feminism washing ou purple washing est, comme vous l’avez compris, le nom donné à la pratique consistant à se cacher derrière un marketing féministe pour finalement ne rien appliquer de ses valeurs fondamentales.

Prenons une marque comme Barbie, qui se réinvente aujourd’hui dans de nouvelles lignes représentant des femmes diverses, dans leurs métiers, leurs accomplissements et leurs ethnies ; sont-ils si étrangers aux critères “classiques” de la beauté ? Ces transformations physiques chez les poupées ne sont intervenues que lorsque la compagnie a rencontré une gigantesque chute des ventes, et ont permis de relancer le produit chez les adultes (qui sont en réalité quand on y pense les premiers acheteurs). En effet, la taille anorexique de Barbie n’a plus sa place dans une société où la mode n’est plus à la “size 0”. Aussi, la diversification des marchés et la montée du pouvoir d’achat d’une clientèle hétéroclite ethniquement ne pouvait mener qu’à une diversification des Barbies. Cette image féministe n’est-elle pas là finalement comme une manière désespérée de refidéliser une clientèle qui a bien plus de choix que dans les années 60-70 ? 

L’Index Egalité Homme-Femme

Depuis 2019, la France rend obligatoire la déclaration publique de l’Index Egalité Homme-Femme pour les grandes entreprises.  Et plus que ça, les entreprises en dessous de 75/100 peuvent être pénalisées financièrement et se voient priées d’améliorer cette situation dans les trois ans.

Bien que cet index soit loin, trèèèès loin d’une quantification exacte des inégalités au sein d’une entreprise, il en donne au moins une idée générale. Certaines failles du calcul sont exploitées par les entreprises pour prétendre au superbe 98/100.

Par exemple, il n’est pas demandé d’être exact dans le pourcentage de différence salariale entre femmes et hommes, les entreprises peuvent s’ajuster à 5% d’écart. Disons que dans la société X, les femmes gagnent 30% de moins que les hommes, et bien notre société peut déclarer 25% de moins, c’est vrai à 5%, c’est donc légal. Aussi, l’indicateur prend en compte l’égalité des augmentations entre femmes et hommes c’est-à-dire, est-ce que l’homme a été augmenté et la femme aussi ? Sans prendre en considération les sommes qui peuvent être très différentes entre les deux sexes. Bien sûr, on pourrait s’attarder longtemps sur toutes les inégalités qui ne peuvent être retransmises par l’index à 5 indicateurs.

5 indicateurs qui sont :

  • L’écart de rémunération femmes-hommes,
  • L’écart de répartition des augmentations individuelles,
  • L’écart de répartition des promotions (uniquement dans les entreprises de plus de 250 salariés),
  • Le nombre de salariées augmentées à leur retour de congé de maternité,
  • La parité parmi les 10 plus hautes rémunérations.

Il est donc plutôt facile de slalomer entre les indicateurs et d’avoir l’air tout féministe et tout joli. 

Maintenant parlons de sujets qui fâchent… On se serait attendu, comme ça, à voir les grandes entreprises industrielles dans le flop. Effectivement, pour Bouygues Bâtiment par exemple c’est bien le cas, ce n’est un scoop pour personne que dans l’industrie du bâtiment, on trouve bien moins de femmes.

Mais certaines entreprises, qui pourtant ne s’empêchent pas de crier leur féminisme sur tous les toits font elles aussi partie des mauvais élèves…

Et pour n’en citer qu’un… Lush ! Effectivement, malgré toutes ces jolies campagnes féministes et pro LGBT, l’entreprise n’a qu’un petit 68/100. Une note très basse au vu de la concurrence et particulièrement dans ce secteur. Malheureusement, le détail de l’index n’est pas publié, nous ne pouvons donc pas savoir réellement la cause de cette mauvaise note. Le nombre de salariés d’un genre ou de l’autre devant être plutôt homogène, il s’agirait sans doute (hypothèse) d’un manquement d’augmentation pour le personnel féminin et de présence dans les sphères dirigeantes. Bien triste quand leur chiffre d’affaires repose sur une clientèle majoritairement féminine…

Pour voir les scores d’autres petits et grands filous, voici le lien officiel.

✍🏼 Maï

Laisser un commentaire